Litige Boulangers/Riverains à Bareina: Succès de la médiation de SOS Esclaves   
17/12/2007

La localité de Bareina située à 207 Kms au Sud Est de Nouakchott a connu le 16 décembre un événement significatif.Un litige soumis à la justice a trouvé enfin, une solution consensuelle suite une médiation menée par Biram Ould Dah Ould Abeidy de SOS Esclaves. Ce litige opposait un groupe de boulangers Hratines à leurs voisins à cause de la fumée dégagée par les boulangeries en banco qui allument le bois mort pour fabriquer le pain.Une famille riveraine des fours avait lié la mort de son tuteur aux fumées dégagées par les fours en question. Les boulangers avaient récusé cette corrélation et revendiqué leur droit à travailler pour vivre.



Quelques familles de Bareina ont ainsi porté plainte devant la justice à Rkiz qui a pris un arrêt portant de changer l’emplacement des fours. Une décision prise semble-t-il en l’absence des boulangers qui ont refusé sa mise en exécution. Depuis lors, les rapports sociaux se sont détériorés entre boulangers et riverains dans cette localité paisible et présentée comme modèle national. Il a fallu une pénible médiation et des concessions de part et d’autres pour qu’un compromis soit trouvé. Ce compromis annoncé dans un meeting organisé l’après midi du 16 décembre au marché de Bareina porte sur l’arrêt d’allumer le bois mort dans les boulangeries, le retrait de la plainte déposée par les riverains, l’attribution aux boulangeries de parcelles de terres en dehors du centre ville et un dédommagement conséquent pour la construction de nouvelles boulangeries dont la fumée ne gênera plus les habitants Cet compromis met fin aux hostilités qui envenimaient les rapports sociaux. Il est le résultat des efforts déployés par Biram Ould Dah Ould Abeid qui n’était pas jusqu’ici, perçu et dans divers milieux, comme un homme de dialogue. Il a été Ã©paulé dans cette mission par le militant anti-esclavagiste Cheikh Ould Maata ainsi que par le député de Rkiz Mohamed Abderrahmane Ould Tolba. Au cours du meeting, plusieurs orateurs se sont succédés pour plaider en faveur de la cohésion et de la symbiose légendaire des populations de Bareina. Nous vous livrons ici, les moments forts, de ce meeting que nous avons couvert sur place.

Mohamed Lemine Ould El Hadj, Imam de la Mosquée de Bareina : «Nous ne mettons pas un maquillage pour masquer une situation donnée».

« Je n’ai jamais vu quelqu’un, maltraiter à Bareina, ou qualifier quiconque, d’esclave. Il y a certes au niveau national des séquelles de l’esclavage que nous devons éradiquer. Et si cela est dû Ã  l’ignorance nul n’est empêché d’étudier à l’école ou dans les Mahadras.
Nous n’empêchons personne d’apprendre. Et s’il y a des pauvres, Allah dit que certains se retrouvent privilégiés par la richesse. Nous ne mettons pas un maquillage pour masquer une situation donnée.
S’agissant de l’affaire des fours, c’est un problème posé depuis cinq années. Elle présente deux aspects préjudiciables à chacune de nos composantes sociales : ceux qui exploitent les fours et ceux qui souffrent de la fumée dégagée par les fours. Il y a quatre fours ici situés sur un même axe qui dégagent la fumée sur les habitants situés à leur Est.
Nous avons tenté un ensemble des solutions à l’amiable en tentant d’élever les cheminées des fours, puis en fournissant le gaz butane aux boulangeries. Ces expériences n’ont pas été concluantes. Après il y eut un décès dans le voisinage des fours. Nous avons tenté de régler le problème à l’amiable puis le problème a été posé devant le cadi. La meilleure façon de respecter son adversaire c’est de poser les litiges devant la justice. Nous sommes dans un Etat démocratique et nous voulons que les institutions jouent leurs rôles.»

 

Mohamed Salem Ould Ahmed Lemrabott, coordinateur de la jeunesse Bareina: «Un procès-verbal d’accord a été établi le 26/10/2007»


«S’il est question ici d’exposer des plaintes, je n’ai rien à ajouter parce que l’affaire est pendante devant la justice. Il y a un procès-verbal d’accord établi le 26/10/2007 dans le domicile de Yahya Ould Beteme que je vous remets».

Mohamed Mahmoud Ould Lemrabott : «Il est inutile de polémiquer pour rien»
«Une solution a été trouvée au problème des fours. Cette délégation est venue nous aider à solutionner ce litige, nous avons abordé avec elle, les pas déjà franchis. Il a été convenu que les propriétaires des fours vont cesser de brûler le bois mort qui dégage les fumées, les plaignants, également retirer leur plainte, le tout, pour réinstaurer un climat de fraternité de collaboration et pour étudier comment donner de travail aux propriétaires des boulangeries. J’estime donc, qu’il est inutile de polémiquer pour rien».

 

El Khalil Ould Cheikhany,  notable et chef spirituel : 

«Nous ne faisons porter à nul d’entre nous, la responsabilité. Nous en sommes tous responsables»
« Terre de bien et de baraka, Bareina n’a jamais connu ce genre de problèmes. Nous n’en faisons porter à nul d’entre nous, la responsabilité. Nous en sommes tous responsables. Il fallait que ce problème soit réglé à notre niveau. Nous devons trouver les solutions pour réparer cela. Nous remercions cette délégation venue nous aider. Elle reflète notre diversité. Il ne s’agit pas d’une délégation venue secourir une frange déterminée. Elle est venue pour soutenir la vérité.»

 

Minnih, chef de file des Boulangers de Bareina: «Mon four, je le préfère à l’immeuble AFARCO!»
« Je suis venu en 1969 dans ce lieu du temps où il n’y avait personne ici. Je suis boulanger et boucher. Jamais personne n’est morte à cause de la fumée de mon four.On m’a dit que suite à la mort d’une personne, un médecin a rédigé une attestation comme quoi la fumée de mon four en est responsable. J’ai rencontré ce médecin qui a catégoriquement nié cela. C’est Said Ould Jdoud qui a porté plainte contre moi. Ce sont eux qui m’ont trouvé ici avant leur arrivée ! S’il est logique qu’un pauvre déménage pour laisser la place à un riche, je vais l’envisager.
On m’a informé d’un jugement du cadi qui ordonné l’arrêt de mon four. J’ai dit que je ne reconnais pas ce jugement parce qu’il n’a pas été pris contradictoirement et que je ne quitterais pas mon four, même si on me tire dessus.
Mohamed Abderrahmane Ould Tolba nous a dit qu’il va Å“uvrer à une solution qui ne nous porte pas préjudice surtout qu’ALLAH a voulu que l’Etat soutienne les faibles, les boulangers, les vendeurs de légumes et les bouchers. Il a dit que le four est évalué à 4.000.000 UM et qu’il y aura l’eau et l’électricité. Je lui ai dis que je n’accepterais que ce qui est dans mon intérêt. Par la suite, ils m’ont parlé d’un four qui sera construit par la commune en dehors de la ville de Bareina. Je leur ai dis que je ne quitterai pas mon four, vivant. D’ailleurs, je demande aux organisations de bienfaisance de me donner une voiture pour m’aider à amener le bois mort. Ce litige m’a causé la perte de 13 moutons, j’ai élevé mes enfants avec ce four. Nous sommes 5 familles à vivre de ce four. Mon four, je le préfère à l’immeuble AFARCO ! Â»

 

Cheikh Ould Maata, militant anti-esclavagiste, membre de Conseil Permanent du RFD:
«Nous ne sommes pas venus pour attiser le feu, mais pour l’éteindre»
«Cet accueil chaleureux ne me surprend guère à Bareina. Nous ne sommes pas venus -comme peuvent le dire certains- pour l’escalade ou pour attiser le feu, mais pour l’éteindre. Nous souhaitons que cette affaire se règle. Nous ne voulons plus revenir à Bareina que pour vous saluer. Nous voulons que ce problème se termine par un consensus qui garantisse à la fois que les fumées dégagées cessent et que les propriétaires des fours soient également convenablement indemnisés».

 

Biram Ould Dah Ould Abeidy, militant de SOS Esclaves :

«C’est la symbiose qui prévaut à Bareina qui fait que nous ne la considérons pas comme les autres localités»
«Au mon nom et au nom de ceux des Mauritaniens dont nous représentons l’opinion, je remercie tous les habitants de Bareina, chefs religieux et populations. J’avais entendu de Bareina, je ne l’ai jamais visité. Je savais de son hospitalité, de sa bénédiction de sa générosité ainsi que la symbiose et l’intégration sociale entre ses composantes à travers un frère digne et valeureux, un frère à tout le monde, pacifique avec tout le monde, qui a de l’amour et de l’affection pour tout le monde et qui nous a donné une belle image de Bareina : je veux parler du regretté Mohamed Abdellahi Ould Tolba.
Nous sommes tenus de respecter la mémoire de ceux qui ne sont plus ! Pour eux et pour les droits de l’homme, je suis venu ici à Bareina avec mes amis pour renforcer l’esprit de cohésion, d’intégration et d’affection léguées par le regretté Mohamed Abdellahi Ould Tolba. SOS Esclaves est une organisation des droits de l’homme connue par sa défense des droits humains et elle le restera.
Ses membres fondateurs proviennent de toutes les ethnies mauritaniennes. Elle défend les droits de tous les citoyens mauritaniens blancs et noirs. Nous défendrons même les droits des étrangers s’il le faut. Nous avons défendu Oud Dedew, les prêcheurs et les imams quand ils avaient été jetés en prison et quand ils furent abandonnés par tout le monde.
Nous les avons défendu contre l’idée répandue qu’ils constituaient un danger. Nous avons dit qu’ils ont des opinions parce que nous croyons à la diversité des opinions religieuses dans le respect des prescriptions de l’Islam. Malgré la terreur, le terrorisme et le chantage, SOS Esclaves sous la présidence de Boubacar Ould Messaoud a tenu à soutenir les opprimés. Nous avons soutenu les prisonniers jusqu’à leur libération. Certains d’entre eux sont devenus membres de SOS Esclaves et ils sont de couleur blanche.
Quand les jeunes officiers exaspérés par le régime de Ould Taya ont pris les armés sans que nous partagions leur méthode et se sont exilés avant d’être arrêtés, nous avons dit que Saleh Ould Hannena ne doit pas être menotté en prison. Nous avons dit que Abderrahmane Ould Mini ne doit pas être menotté en détention et privé de nourriture et de lecture. Nous avons dit que le prisonnier a des droits comme l’a recommandé le prophète Mohamed (PSL). Ils n’étaient pas des Hratines et nous les avons défendu et sommes restés à leurs côtés. Présentement Mariem Mint Neinine épouse de l’ex-commandant Ould Waer est membre éminent de SOS Esclaves. Elle n’est pas non plus une Hratine.
Auparavant, nous avons défendu les veuves et les orphelins de militaires négros-africains exécutés. Cela nous a voulu d’être mis au banc, d’être privés de terres, de licences de pêches et de postes jusqu’à ce que une solution soit envisagée présentement pour eux. Nous étions les premiers à en parler.
Nous soutenons de toutes nos forces les esclaves maintenus en servitude devant les foyers esclaves, jadis niés, malgré nos affirmations que nous avons maintenues jusqu’à ce que l’Etat a fini par reconnaître l’existence de l’esclavage et l’a criminalisé par une loi. Nous soutenons aussi ceux qui ne sont plus esclaves mais qui sont privés de leurs droits.
Notre rencontre d’aujourd’hui à Bareina est singulière. Dans d’autres endroits, nous retrouvons de grandes difficultés contrairement à Bareina où il y a symbiose et intégration. Par contre dans d’autres villages, les autorités locales -contrairement à l’autorité suprême du président de la République-,restent en marge des directives du président de la République. Dans la moughataa de R’kiz, à Lexeiba Yacoub Ould Moussa Ould Cheikh Sidiya , Mohamed Ould Habibourahmane, Abdellahi Salem Ould Ahmedoua ont confisqué des terres appartenant à des Adwabas d’Esclaves, de Hratines et de Tlamides sur la base des documents établis par l’administration locale par lesquels ils les privent de leurs droits et les exploitent. Ceci est une injustice commise avec le soutien des cadis, des hakems, des walis et des gendarmes.
Nous disons aussi qu’ici Mohamedou Ould Ahmed Bebou Ã  Lekreya présenté comme un chef religieux soufi déclare avoir marié collectivement un groupe de femmes esclaves dont il ne reconnaît pas les enfants. C’est une violation des droits de l’homme et une atteinte aux droits des femmes et des enfants. Nous avons dit qu’à Lemteyine Sid’Ahmed et son frère Ely, Yehdhih Ould Houcein, Khalil Ould Toueinsi, Mohamed Abdellahi Ould Brahim Vall et Bilal Ould Mbareck ont voulu empêcher Hana de partir avec son mari Isselmou qu’ils ont menacé après avoir frappé Hana. Nous avons dit que cela est interdit. Nous avons déposé une plainte contre eux mais le hakem de Rkiz Aboubecrine Ould Khourou, le commandant de brigade Larabass Ould Amar et le procureur de la République à Rosso ont comploté contre ces plaintes et empêchent la justice de se faire. Cela veut dire qu’il y a une catégorie d’individus au dessus de la loi, qui n’est pas sanctionné. La loi doit s’appliquer à tout le monde. Le hakem et la gendarmerie de R’kiz n’appliquent pas la loi en faveur de Minnih mais au profit des notables de Bareina. Nous refusons que la loi soit appliquée seulement, en faveur d’une frange déterminée. Ce qui prévaut ici à Bareina comme équité, doit inspirer les autorités de R’kiz. Je voudrais dire à Minnih et aux citoyens de Bareina affectés par la fumée dégagée par les fours qu’ils doivent veiller à l’application d’une loi juste. C’est la symbiose qui prévaut à Bareina qui fait que nous ne la considérons pas comme les autres localités.
Quand j’ai rencontré Mohamed Abderrahmane Ould Tolba, j’ai vu en lui une personne consciente de ces problèmes, soucieuse de la cohésion des populations contre laquelle oeuvre les autorités administratives.
Et que les gens se rassurent, nous sommes déterminés à poursuivre les auteurs de crimes d’atteintes aux droits de l’homme même s’il faut attendre 60 ans. Il y a des dispositions qui permettent de les poursuivre devant les juridictions internationales. Mais je tiens à souligner que nous n’acceptons pas ceux qui veulent nous engager dans des affaires infondées. Nous ne soutenons que les causes justes.
Avec Mohamed Abderrahmane Ould Tolba nous nous sommes mis d’accord que les gens de Bareina resteront ce qu’ils étaient sur la base de l’indemnisation qu sera étudiée pour qu’elle soit conséquente et honorable. Des terres seront également attribuées aux propriétaires des fours. Il faudrait que chacun se sente gagnant. La fumée dégagée par les fours va être arrêtée et les propriétaires des fours vont être indemnisés. Je leur demande de cesser d’allumer le feu que dégage les fumées et je demande aux plaignants de retirer leur plainte. Nous voulons que Bareina reste un laboratoire et une vitrine de l’unité nationale et de la cohésion sociale».


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