Au lendemain du lancement de l’offensive terrestre israélienne sur la Bande de Gaza, après huit jours de frappes aériennes sur des objectifs du Hamas, l’étroit territoire côtier palestinien était coupé en deux par les troupes de Tsahal qui encerclaient la ville de Gaza et progressaient rapidement, appuyées par des chars, des pièces d’artillerie et l’aviation.
Cette deuxième phase dans l’offensive menée par Israël depuis le 27 décembre a fait plusieurs dizaines de victimes du côté palestinien. A Gaza, le nombre de tués a déjà dépassé le chiffre de 500. L’armée israélienne a pour sa part annoncé la mort d’un de ses soldats. Les services de santé de Gaza ont fait état de la mort d’une fillette de 12 ans, de cinq membres d’une même famille et de huit autres civils tués dans l’explosion d’un obus de char à Beit Lahiya, dans le nord de la Bande de Gaza. Selon l’ONU et des responsables palestiniens, une centaine de civils figurent parmi les tués. A Ramallah, en Cisjordanie, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a qualifié cette offensive d’ «agression brutale» et renouvelé son appel à des discussions de réconciliation avec le Hamas. Si les manifestations se multiplient dans le monde musulman, cette intervention militaire paraît jusqu’à présent très bien perçue par l’opinion israélienne. Toutefois, si l’action terrestre devait se traduire par de lourdes pertes, les avis pourraient rapidement s’inverser. L’incursion dans la nuit de samedi à dimanche de milliers de soldats regroupés en trois brigades a déclenché de violents affrontements. Un porte-parole du Hamas a aussitôt averti que Gaza deviendrait un cimetière pour les forces d’Israël. La télévision israélienne a montré des soldats portant lunettes de vision nocturne et tenues camouflage, le visage peint, avançant en file. Pour protéger les troupes au sol, des raids aériens étaient menés sur Gaza. L’offensive se concentrait sur le nord de la Bande de Gaza. Tsahal s’est ainsi employée à couper la ville de Gaza du reste du territoire. Des forces blindées positionnées au sud de la cité ont également progressé jusqu’à l’ancienne colonie de Netzarim, qu’Israël avait quittée comme d’autres implantations lors de son retrait en 2005. L’aviation israélienne a frappé une quarantaine de cibles au cours de la nuit. Les troupes israéliennes ne sont cependant pas entrées dimanche matin dans les grandes localités de la Bande de Gaza, concentrant leur action dans les zones rurales. La seconde phase de l’opération a commencé à la veille de l’arrivée d’une délégation ministérielle européenne au Caire. La troïka réunissant les ministres tchèque, français et suédois des Affaires étrangères devait précéder d’une journée le président français Nicolas Sarkozy attendu dans la région lundi et mardi. Il doit rencontrer le président égyptien Hosni Moubarak à Charm el-Cheikh, puis Mahmoud Abbas à Ramallah avant de dîner avec Ehoud Olmert à Jérusalem.
L’aviation israélienne tue et mutile Les avions israéliens ont continué à viser des dizaines d’objectifs. "On tue des civils (...) Des gens sont mutilés, frappés dans leur chair, tout le monde est terrifié", a témoigné un médecin du Croissant-Rouge. Israël n’a pas révélé combien de ses soldats étaient engagés à Gaza mais a rappelé des milliers de réservistes et s’attend à ce que l’opération dure "de longs, longs jours", selon les termes d’un porte-parole de l’armée. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a appelé à la fin immédiate des opérations terrestres, de même que la France - dont le président Nicolas Sarkozy, est attendu lundi à Jérusalem - l’Egypte et la présidence de l’Autorité palestinienne, évincée de Gaza par le Hamas en juin 2007. Dans une interview paraissant lundi dans les quotidiens An Nahar, As Safir et l’Orient-Le Jour, Sarkozy condamne à la fois l’offensive israélienne dans la bande de Gaza et les tirs de roquettes du Hamas contre Israël et demande un cessez-le-feu d’urgence. La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a quant à elle annulé une visite en Chine, où elle aurait dû s’envoler ce dimanche, invoquant la nécessité de rester à Washington pour suivre la situation dans la bande de Gaza. Mettre le bourreau et la victime sur le même plan Le Qatar, riche émirat pétrolier du Golfe et allié des Etats-Unis, a qualifié dimanche l’offensive militaire israélienne dans la bande de Gaza de "crime de guerre" et réitéré son appel à un sommet arabe extraordinaire. "Notre peuple (arabe) est la cible ces derniers jours à Gaza d’une agression injuste qui ne fait aucune différence entre les enfants, les femmes et les personnes âgées, entre les combattants et les civils", a déclaré l’émir, Cheikh Hamad ibn Khalifa. "Une guerre lancée avec de tels armements modernes contre de telles cibles - des camps de réfugiés - n’est rien d’autre qu’un crime de guerre", a-t-il dit, cité par Al Djazira. L’émirat du Qatar occupe une position très particulière sur l’échiquier politique arabe: il abrite à Doha le Commandement militaire central américain (Centcom) et entretient des rapports limités avec Israël tout en ayant des liens très étroits avec les islamistes palestiniens du Hamas, classé "organisation terroriste" par le département d’Etat. Pour l’émir, inviter pareillement les Israéliens et les Palestiniens à mettre fin aux violences revient à "mettre le bourreau et la victime sur le même plan".
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