Election présidentielle : Au plus consensuel   
18/03/2007

A l’aube du 10 juillet 1978 les Mauritaniens se sont réveillés avec un coup d’état qui devait, à en croire ses auteurs, marquer la fin d’une époque. Par un lapidaire communiqué n° 1, nous avons appris que «le régime de la corruption anti- national et anti- populaire a pris fin». Salué par des foules encadrées par ceux là même qui encensaient le pouvoir renversé, ce changement avait ,néanmoins, modifié , substantiellement, la carte politique du pays



A présent, nous voilà, un quart de siècle après cet événement, douloureux pour les uns, heureux pour les autres, sommés, suite à un scrutin libre et démocratique, de choisir entre deux présidentiables issus du régime que nous avons, jadis, enterré.
Il conviendrait, tout d’abord, de reconnaître que cet appel au passé en faveur d’une alternance, elle même imposée par un coup de force, constitue un éclatant Ã©chec pour toute une génération politique qui n’a pas su produire des nouvelles espérances suffisamment acceptées.
S’il est vrai que de temps en temps, des porteurs de grandes illusions font une apparition quelque peu messianique avant de s’enfoncer dans une réalité des plus sombres et des plus compliquées et que des leaders d’opinion se sont distingués par une honorable endurance qui leur a conféré une certaine légitimité nationale, il n’en demeure pas moins vrai qu’ il faudrait partir de ce constat troublant qui porte, en lui même, les germes d’une lente évolution de l’alternance au sommet de l’Etat.
On a, sans doute, raison de se réjouir du progrès de l’option démocratique engagée depuis 1991 et, surtout, de l’unanimité avec laquelle les nombreux observateurs ont salué la transparence du scrutin du 11 mars. Mais, en aucun cas, on ne peut effacer ce que dissimile une telle satisfaction comme rudes et complexes réalités tenant aux clivages désuets ainsi qu’ aux manières archaïques qui ont été attisés par les prétentions démesurées de la Démocratie conflictuelle.
Certes, on a, également, raison de se réjouir de la fascinante indignation patriotique soulevée par les jugements déplacés de quelques autocrates liberticides pour lesquels des particularités liées, entre autres, à la bédouinité et à la diversité ethnique constituent un immuable obstacle à l’évolution démocratique de la Mauritanie. Mais, on ne peut feindre d’ignorer qu’une nation, comme la notre, esclave du réflexe identitaire et des mentalités tribales, ne peut pas être libre dans ses pratiques politiques et institutionnelles.
C’est d’ailleurs en raison de cette pénible réalité que le changement s’impose et il faudrait bien savoir que le futur pouvoir n’a pas le choix. Tout indique que si ce pouvoir n’engage pas, par le biais d’une réelle bonne gouvernance, les reformes, impatiemment, attendues, le pays renouerait, avec l’instabilité dont les facteurs internes et externes n’ont pas été jugulés.
Cela dit, il faudrait bien, à travers le scrutin du 25 mars, choisir la forme de ce changement unanimement revendiqué. Or par delà les préférences rattachées aux personnes des deux candidats qui inspirent un identique respect, ce qui est en jeu c’est , qu’on le veuille ou non, le choix entre deux projets diamétralement opposés.
Il s’agira de marquer soit une préférence pour une option conflictuelle qui reconduirait, dans ses principaux traits, les clivages entre l’ancienne majorité et l’ancienne opposition que les Mauritaniens ont, par un vote éclaté, désapprouvé ou par contre, d’envoyer un message consensuel relatif à l’impérieuse nécessité de dépasser cette confrontation préjudiciable pour le pays.
Cette volonté de dépassement est d’autant plus bénéfique que le débat semble favoriser l’urgence d’aborder, sans intitules passions, le volet politique dans sa dimension fondamentale : Islam et islamisme, unité nationale ou question nationale, réparation ou impunité, inégalités structurelles ou esclavage, Etat de Droit et coups d’état etc.
Au total, toutes ces questions dont la sensibilité a, considérablement affecté la stabilité de la Mauritanie devraient, désormais, faire l’objet d’une approche consensuelle qui nous permettrait d’avancer.
En guise d’une lecture des résultats du premier tour des élections législatives organisées en novembre dernier nous avons pu Ã©crire ce qu’: «il faut garder à l’esprit que le message profond que les Mauritaniens ont envoyé, au premier tour, tient au fait indéniable qu’ils sont, à présent, profondément divisés, voire, passionnément désunis».
Dans la carte éclatée qu’ils ont tracé par leurs sentiments, on ne peut plus, divergents, ils ont quelque part, lancé un appel Ã  un homme qui serait à la mesure de leur destin commun.
Celui-ci devrait, forcément, se situer au-delà de l’ombre qui plane sur un paysage politique plus que jamais transformé en multitude confuse. Il devrait malgré ou à cause des pouvoirs exorbitants que la constitution lui confère, et dans l’intérêt de la Mauritanie, se placer en juste arbitre au dessus de tous les partis et de tous les indépendants Â».
En essayant de dresser le portrait du Â«Président qu’il faut», il nous semble bien difficile de ne pas lancer un appel en faveur du Â« Président qui rassure Â». A ceux qui ne manqueraient pas de poser la question malicieuse de savoir à qui profiterait cette assurance promise, il faudrait rappeler que comme , nous l’avons, également , déjà écrit : « Le peuple mauritanien dont l’unique demeure se trouve à l’horizon a bien besoin d’un respectable et consensuel porteur de rêves qui saura , comme ce vent évoqué par Odette du Puigaudeau, effacer sur le sable fuyant les traces du vainqueur en même temps que celles du vaincu Â» et qui, après avoir découvert,par lui même, que le pouvoir est source d’ennuis et que l’enjeu de la bataille, en cours, se situe ailleurs : dans le sens de la justice, dans le développement, dans une équitable distribution des richesses nationales â€¦ se contenterait de son statut de passager éphémère et , en ce moment là, il ne peut que marcher pieds nus sur ce sable, comme les autres Â».
A présent, je crois qu’il est de mon devoir de dévoiler le sentiment favorable que j’éprouve à l’égard du candidat Sidi ould cheikh Abdallahi lequel me parait plus consensuel par rapport à son rival.
Je m’incline à cet exercice qui ne peut, naturellement, échapper à l’inconvénient du parti pris, mais avec tout le respect que je dois au candidat Ahmed ould Daddah auquel je m’opposerai, sans la moindre rancune, au cas où il est élu.
Abdel Kader Ould Mohamed
Juriste, ancien secrétaire d’Etat


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