Développement rural: À quand le véritable désenclavement de la Vallée?   
07/06/2006

La Vallée du fleuve Sénégal a longtemps été mise au ban des régions à développer en Mauritanie. La construction de la route Rosso/Boghé ouvre des perspectives pour un désenclavement total de la région. Mais d’autres secteurs, comme la télécommunication, l’électricité attendent la révolution
L’antenne de Mauritel Mobiles a été érigée voilà déjà plus de 6 mois à Tékane, situé à 60 kilomètres à l’est de Rosso, mais elle n’est toujours pas active. Selon le prétexte tout trouvé : "il manque un groupe électrogène pour le faire fonctionner, et quelques pièces complémentaires à son sommet." La société privée avait promis au maire du village, la mise en action de l’antenne avant le 20 janvier 2006. En attendant, les habitants communiquent par le réseau d’Alizé, opérateur sénégalais.



" Depuis la fin du montage de la structure métallique de l’antenne, les agents de Mauritel ne sont pas repassés. Ils nous ont sûrement oubliés." affirme en souriant Cheikh, agriculteur à Tékane. Pour la venue du "Boss"à Rosso, la société avait promis l’envoi d’une unité mobile temporaire dans la région en attendant le fonctionnement effectif de l’antenne. Il n’en sera rien.
Ce problème de communication isole toute une partie de la Vallée du réseau mauritanien. "En cas d’urgence médicale, ou simplement d’une urgence dans le cadre agricole à transmettre à Rosso, on est obligé de passer par un réseau sénégalais, et encore si on le capte, ce qui n’est pas toujours évident." reprend plus énervé Cheikh.
Cet enclavement au niveau de la télécommunication se prolonge dans les infrastructures routières, qui par leur inexistence, rendent l’accès au village et ses environs extrêmement difficile. Mais la route bientôt opérationnelle entre Rosso et Boghé, financée par la Banque Africaine pour le Développement (BAD) et l’Union Européenne, permettra un accès amélioré à la région. L’inexistence d’un trajet sécurisé, n’étant pas soumis aux aléas du climat double, voire triple parfois les prix de construction immobilière, ou le prix des produits alimentaires, plus chers du fait d’un coût de transport élevé entre Rosso et Tékane. La route achevée devrait permettre une résorption de ce prix surévalué de la construction. "Le premier camion de livraison de matériel pour une maison de 4 chambres et deux salons vient d’arriver. Le transport nous est revenu à 180 000 ouguiyas, alors que pour une région plus éloignée avec une route bitumée, vous retrouvez ce coût diminué de 15 à 30 000 ouguiyas."
La route devrait donc permettre un investissement plus important des habitants de la région dans leurs propres terres. Le barrage de Diama n’a pas non plus arrangé la situation de cette région. Celui-ci a coupé la région de ses principales ressources en élevage et dans l’agriculture

Un barrage malvenu pour la région
Le barrage qui alimente en électricité une partie de la capitale et des villes environnantes, a coupé le courant d’eau qui nettoyait les affluents du fleuve Sénégal de ses déchets et d’éventuelles bactéries. Sans cet antiseptique naturel, des maladies comme la bilharziose se sont implantées durablement dans les eaux des affluents, et ont rendu l’eau impropre à la consommation. Les terres sont beaucoup moins cultivables, du fait de la stagnation des eaux. La culture du maïs et du mil garantissait une sécurité alimentaire des habitants de la région. Une flore herbeuse plus consistante pour vaches et moutons, permettait de fournir en abondance de la viande et du lait. Cet état de fait d’il y a à peine 20 ans n’est plus. Le marasme dans lequel a été plongée la région suite à l’amputation de ses moyens naturels de subsistance a incité quelques agriculteurs de la région, et de Tékane en particulier, à sortir de la monoculture du riz. La localité a développé une agriculture plus diversifiée. C’est dans ce sens que des champs de piments, de bananes, de mangues, patates douces et autres produits de contre-saison ont été aménagés. Ces produits nécessitent moins de moyens de production, et peuvent générer une productivité plus importante que le riz. D’autant que la demande pour ces produits agricoles existe sur le marché mauritanien et dans la sous région. "Je vends un kilo de piments jaunes, de grande qualité, entre 2500 à 3000 francs CFA au Sénégal. C’est beaucoup plus avantageux que le riz dont la production est éreintant et rapporte moins. En plus, il faut faire venir de l’engrais, du gasoil et des machines de la ville à des coûts astronomiques. Les agriculteurs supportent mal tous ces aléas. Sans parler de la concurrence du riz asiatique et occidental… " explique Cheikh Kana, riziculteur reconverti avec succès dans la culture de diversification.


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