L’artificier du GICM condamné à 20 ans en appel   
17/06/2009

Saâd Housseïni, l’un des principaux accusés dans les attentats de Casablanca en 2003 et de Madrid de 2004, a vu sa peine aggravée en appel mercredi 17 juin, passant de 15 à 20 ans de prison, a-t-on appris mercredi de source judiciaire. En février dernier, Saâd Housseïni avait été condamné à 15 ans de prison par le tribunal antiterroriste de Salé, proche de Rabat.



La cour d’appel a également aggravé les peines de réclusion de cinq autres co-accusés -passant de 8 à 10 ans- et confirmé la condamnation de 12 autres personnes (une à 5 ans de prison, les onze autres à 3 ans. Saâd Husseïni, 38 ans, et ses co-accusés avaient été arrêtés en 2007 au Maroc. Il est considéré comme l’artificier présumé des attentats de Casablanca (45 morts, dont 12 kamikazes) et de Madrid (181 morts). Saâd Housseïni, qui avait séjourné en Espagne, avait été interrogé fin 2007 au Maroc par le juge espagnol Juan Del Olmo dans le cadre d’une commission rogatoire pour ses liens présumés avec les attentats de Madrid, imputés au Groupe islamique des combattants marocains (GICM), proche d’Al-Qaïda. Il était soupçonné au Maroc d’être le chef de la commission militaire du GICM et en Espagne d’être "le fabricant des explosifs ayant servi dans les attentats de Madrid". Saâd Housseïni était poursuivi au Maroc pour "atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat" et "constitution de bande criminelle dans le but de préparer et commettre des actes terroristes visant à troubler l’ordre public". Originaire de Meknès (120 km à l’est de Rabat), Saâd Housseïni est titulaire d’une licence en chimie. Après un séjour en Afghanistan en 2002, il avait regagné le Maroc au cours de la même année. La police l’avait interpellé puis relâché. Il sera arrêté cinq ans plus tard.

 

Les mouvements armés islamistes marocains

par Majdouline ElAtouabi
Après une longue cavale qui a duré plusieurs années, Mustapha Sebtaoui, alias Sâad Al Houssaini l’une des figures mythiques du terrorisme marocain a été arrêté en Syrie à la fin de l’année 2005. Deux mois plus tard, en février 2006, il a été extradé vers le Maroc. Soupçonné d’être l’un des fondateurs du Groupe Islamique Combattant Marocain (GICM), il encourt la peine capitale pour sa participation à la préparation des attentats du 16 mai 2003 à Casablanca et ceux du 11 mars 2004 à Madrid. En attendant ce jugement, Sâad Houassaini qui a été traduit devant la cour d’appel de Rabat est actuellement incarcéré dans la prison de Salé où il côtoie les autres chefs des mouvements islamistes radicaux marocains. Ceux-ci ont été arrêtés pour la plupart au lendemain des attentats du 16 mai 2003. En cette période trouble, les Marocains découvrent à travers les médias nationaux et étrangers que, à l’instar du voisin algérien, leur pays héberge des fanatiques prêts à sacrifier des vies humaines et à se sacrifier eux-mêmes pour promouvoir leurs idées obscurantistes. Assirat Al Moustaqim (le droit chemin), Al Amro bil Mâarouf wa Nnahyou ani Lmounkar (recommander le bien et empêcher le mal) et, surtout, les très sanguinaires Salafia Jihadia (Salafisme combattant) et Attakfir Wal Hijra (excommunication et exil) sont autant de groupuscules qui émergent du lot et font parler d’eux dès l’année 2001. Ils seront rejoint en 2003 par le GICM qui a acquis une notoriété internationale après les attentats du 11 mars 2004 à de Madrid. Dès lors, le GICM et les groupes radicaux marocains deviennent une sorte de référence en matière de terrorisme international.
Pour autant, leur apparition ne date pas de ces attentats. Elle remonte au début des années 90 et coïncide avec le retour des combattants marocains en Afghanistan.
À partir de cette date, les groupes islamistes radicaux marocains commencent à asseoir leur présence à travers le Royaume. Des années durant, ils vont fleurir, essaimer et prospérer à l’ombre des quartiers populaires déshérités et dans les campus des universités marocaines. À Fès, Tanger, Salé ou Casablanca, plusieurs circonscriptions seront ainsi soumises au joug de la Salafia Jihadia et d’Attakfir Wal Hijra et leurs émanations comme Moujahidou Al Maghrib et Assirat Al Moustaqim. Forts de leurs milices, ces groupes se substituent à l’État pour assurer la sécurité et l’ordre moral dans ces quartiers réputés difficiles. Ils encadrent la population, endoctrinent les jeunes recrues dans des mosquées clandestines, allant même jusqu’à établir des dîmes qui étaient récoltées par la force de l’épée. Tout cela, sous l’œil impuissant des autorités, qui se contentaient de réagir par quelques arrestations sporadiques suivies de condamnations légères. Il a fallu donc attendre que le sang coule à flots, le 16 mai 2003, pour qu’une opération d’envergure soit lancée à leur encontre.
Pourtant, les fanatiques avaient commencé leur Å“uvre meurtrière bien avant les attentats de Casablanca. À Casablanca, c’est Assirat Al Moustaqim, un groupuscule dont les membres se revendiquent d’Attakfir Wal Hijra, qui ouvre le bal. Le 24 février 2002, à Douar Sekouila, dans la circonscription casablancaise de Sidi Moumen, celle-là même d’où sortiront les kamikazes du 16 mai 2003, une brigade d’Assirat Al Moustaqim décide d’appliquer la fatwa meurtrière de son chef, Miloudi Zakaria. Ce salafiste pur et dur avait décrété quelques jours auparavant ni plus ni moins que la mise à mort d’un homme dont le seul tort est son penchant pour la boisson. Le malheureux sera lapidé et battu à mort. La scène, d’une sauvagerie inouïe, se déroule sous les yeux terrifiés de la population locale. Une autre aile d’Assirat Al Moustaqim dirigée par Youssef Fikri était quant à elle à l’origine de plusieurs affaires criminelles qui se sont déroulées entre 1998 et 2002. Durant cette période, ce réseau a commis pas moins de huit assassinats, dont celui d’un ex-brigadier de police, en décembre 2002, et celui du notaire Abdel Aziz Assadi en septembre 2001.
Évoluant à mi-chemin entre banditisme et islamisme radical, les adeptes d’Assirat Al Moustaqim autorisent le meurtre des "mécréants", y compris d’autres musulmans, et légitiment le recours à des actes criminels comme le vol et le trafic de drogue, dont les fruits servent à financer leur cause. Les membres de la Salafiya Jihadiya préconisent, quant à eux, une lecture ultra rigoriste de l’islam et la guerre sainte généralisée contre les ennemis de la foi, comme seul moyen pour rétablir les années fastes de la nation musulmane. Même s’il s’en défend, Mohamed Fizazi, alias Abou Maryam, est l’éminence grise de ce mouvement. Il est suppléé par Abdelkrim Chadli, alias Abou Oubeïda. Les deux hommes ont été condamnés dans le cadre des attentats du 16 mai 2003 à Casablanca, dont la Salafia Jihadiya constitue le principal instigateur. Il faut cependant noter que, dans une sorte d’alliance des forces du mal, ces divers mouvements ne rechignent pas à collaborer entre eux.
Et les liens de la Salafia Jihadiya avec Attakfir Wal Hijra sont aujourd’hui clairement établis. Les adeptes de cette dernière mouvance considèrent la société marocaine comme une société impie dont il faut se démarquer à travers l’exil. La plupart s’établissent dans des localités éloignées ou dans les quartiers périphériques marginaux, comme celui de Sidi Moumen à Casablanca. Tandis que d’autres optent carrément pour des contrées lointaines, comme l’Afghanistan, la Syrie ou le Pakistan. Ce n’est donc nullement un hasard si cette formation compte parmi ses rangs un nombre important d’afghans marocains. C’est notamment le cas de l’ancien imam de la mosquée du quartier Al Berkani de Fès, Mohamed Abdelouahab Rafiki. Plus connu sous le nom d’Abou Hafs, ce trentenaire compte parmi les leaders les plus influents d’Attakfir Wal Hijra. À l’instar des autres chefs des mouvements radicaux marocains, il croupit sous les verrous depuis les attentats de Casablanca.
En effet, au lendemain de ce drame, une opération d’envergure a visé l’ensemble des dirigeants des groupuscules islamistes, décapitant par la même la mouvance radicale de ses têtes pensantes. Mais ce n’est pas pour autant que le danger a complètement disparu. Même derrière les barreaux, les dirigeants de la Salafia et ceux d’Attakfir restent influents. Leurs adeptes sont toujours aussi nombreux dans les villes marocaines. Malgré tout, leur capacité de nuisance est aujourd’hui minime. En revanche, le problème se pose autrement pour le Groupe Islamique des Combattants Marocains (GICM) qui a prêté allégeance à Al Qaïda avec laquelle il partage la même ligne idéologique. Le GICM constitue en effet une organisation plus transnationale que locale. Fondé en 1997 par des anciens combattants marocains en Afghanistan, dont Sâad Houssaini et Hassan El Haski, qui a été arrêté le vendredi 18 décembre 2004 à Lanzarote dans l’archipel des Canaries, ce mouvement reste très mystérieux. Sur son tableau de bord figure la création d’un Etat islamique au Maroc avec le concours technique, logistique, matériel et humain d’Al Qaida.
Ses chefs ne sont pas clairement identifiés, mais ses adeptes se comptent par centaines, notamment parmi la diaspora marocaine à l’étranger. Sa dernière tentative d’attentat au Maroc remonte à la fin du mois de décembre 2005, lorsque plusieurs de ses membres, dont Mohamed R’ha et Khalid Azik, furent arrêtés. En plus d’acheminer des jihadistes marocains vers l’Irak, ils avaient créé une cellule terroriste qui s’apprêtait à commettre des attentats contre des cibles américaines et étrangères au Maroc. Disposant de moyens importants, le GICM, qui s’était illustré le 11 mars 2004 lors des attentats meurtriers de Madrid, constitue aujourd’hui la principale source d’inquiétude pour les services marocains de sécurité.


Toute reprise totale où partielle de cet article doit inclure la source : www.journaltahalil.com
Réagir à cet article
Pseudo
E-mail
Commentaire
Entrer le code
La rédaction de Tahalil vous demande d'éviter tout abus de langage en vue de maintenir le sérieux et de garantir la crédibilité de vos interventions dans cette rubrique. Les commentaires des visiteurs ne reflètent pas nécessairement le point de vue de Tahalil et de ses journalistes.
Les commentaires insultants ou diffamatoires seront censurés.

TAHALIL 2006-2022 Tous droits reservés