Eclairages sur la faillite d’Air Mauritanie    
10/12/2008

Un  document rendu public par la commission chargĂ©e du suivi des dĂ©tenus membres du Front National de la DĂ©fense de la DĂ©mocratie (FNDD front anti- putsch) apporte  dans une  contribution  intitulĂ©e : «Otages de la justice du GĂ©nĂ©ral» des Ă©clairages  sur les Ă©tapes  ayant prĂ©cĂ©dĂ© la faillite d’Air Mauritanie. Une faillite qui a rĂ©ellement commencĂ© en 1997 et pour laquelle sont poursuivis quelques  ex-directeurs gĂ©nĂ©raux  triĂ©s de cette compagnie nationale,  sans que ceux qui ont dĂ©cidĂ© de sa faillite  en 2006  ou qui en ont profitĂ©  en 2007  ne soient inquiĂ©tĂ©s.



Eh Oui, c’est en  Mauritanie seulement, oĂą on peut voir des voleurs voler avec les voleurs;  et pister avec les pisteurs.

                          Otages de la justice du GĂ©nĂ©ral

L’objet de cette note est d’éclairer les opinions publiques nationale et internationale ainsi que la presse sur ce qu’il est convenu d’appeler désormais l’affaire Air Mauritanie, étant entendu que la « faillite programmée » de cette société a commencé, en réalité, en 1997.
Nous nous limiterons ici à l’accusation selon laquelle les personnes détenues sont responsables de la programmation de cette faillite.
Il est étonnant d’y associer certains Présidents de Conseil d’Administration (Mohamed Abdallahi Ould Sidi et Tijani Ould El Houssein) au moment où les groupes qu’ils représentent ont augmenté de manière substantielle leur contribution dans la compagnie (augmentation du capital, crédits fournisseurs, …).
L’Etat qui ne détenait que 11% du capital de la compagnie peut-il être plus préoccupé de la pérennité de la société que ceux qui y ont investi beaucoup de moyens ?
S’il avait un intérêt particulier et hautement stratégique pour cette compagnie, pourquoi s’en est-il séparé au cours de l’année 2000 ?
Pour les personnes averties, les raisons sont simples. En effet, le processus d’ajustement engagé par les pouvoirs publics depuis 1992 a débouché sur le recentrage du rôle de l’Etat et son désengagement des secteurs qui n’étaient pas jugés stratégiques. Or, manifestement, Air Mauritanie a connu de graves difficultés qui ont conduit à sa faillite en 1997 et à la nomination d’un Administrateur provisoire au cours du premier semestre 1998.
L’Etat ne pouvait plus opérer dans un secteur extrêmement difficile et structurellement déficitaire. Cela n’est d’ailleurs pas propre à Air Mauritanie. Air Sénégal, Air Mali, Air Ivoire, Air Niger, Air Guinée pour ne citer que les compagnies régionales, n’ont-elles pas été liquidées par leurs Etats respectifs avant même l’année 2000 ?
Leurs dirigeants ont-ils eux aussi été accusés d’avoir programmé leurs liquidations ? Pourtant le potentiel de trafic aérien est beaucoup plus important dans ces pays que dans le nôtre. Il a tout simplement suffi que leurs Etats cessent de les subventionner pour qu’elles s’écroulent.
En quoi Sidi Mohamed Ould Biya et Isselmou Ould Khattry peuvent-ils être impliqués dans la programmation de la faillite de cette compagnie ? Le premier a été désigné comme Administrateur Provisoire de la société en difficulté, avec une mission bien précise de restructuration et ce avant que la Compagnie ne soit privatisée, tandis que le second y est resté deux mois seulement avant que la Gouvernement ne décide qu’il n’y avait plus d’autre voie que celle de la liquidation !
Quant aux autres directeurs généraux, Moustapha Ould Hamoud et Yahya Ould Ahmed Waghf, il suffit de suivre les efforts qui ont été réalisés au cours de leurs gestions, les mesures prises par eux, pour se rendre compte qu’Air Mauritanie est devenue une véritable compagnie de dimension régionale, desservant plusieurs capitales africaines et assurant plusieurs liaisons hebdomadaires sur Paris.
Avant la réalisation de ce programme ambitieux, il ne faudrait pas oublier que l’Etat avait décidé au moment de la privatisation, de céder ses parts dans la compagnie à un consortium dirigé par Air Afrique qui avait à l’époque de graves difficultés, ce que l’Etat savait parfaitement.
Par la suite, au cours de la période où Air Afrique assurait la gestion d’Air Mauritanie, (Juin 2000 à Janvier 2002) le partenaire stratégique a été liquidé.
L’absence d’une compagnie concurrençant Air France sur la desserte de Paris et des comportements humiliants vis-à-vis de certains membres du Gouvernement et hauts fonctionnaires ont amené les pouvoirs publics à s’intéresser de nouveau à Air Mauritanie, à la condition qu’elle puisse assurer la liaison avec la France.
Après une première expĂ©rience qui a Ă©chouĂ© très rapidement Ă   la fin de l’annĂ©e 2001 (3 vols ont Ă©tĂ© effectuĂ©s par un avion affrĂ©tĂ©), le gouvernement a demandĂ© aux actionnaires privĂ©s majoritaires de nommer Moustapha Ould Hamoud Ă  la tĂŞte de la compagnie, avec comme mission essentielle d’étudier la capacitĂ© de celle-ci Ă  rĂ©aliser la desserte Nouakchott-Paris.
A ce sujet, des assurances lui ont été données que s’il réussissait à réaliser cet objectif, l’Etat était prêt à soutenir la compagnie sur tous les plans.
C’est ainsi qu’un programme ambitieux a été mis en place sur une période de 2 ans ; la stratégie retenue a permis de réaliser les actions suivantes :
- acquisition de deux appareils neufs de type Boeing 737 – 700, nouvelle génération pendant 10 ans d’un montant de 212 millions d’ouguiyas,
- acquisition d’un matériel de Handling pour un montant de 70 millions d’ouguiyas,
- formation du personnel navigant et technique pour plus de 379 millions,
- divers investissements pour 646 millions d’ouguiyas,
- règlement de dettes antérieures à 2002 pour environ 2 milliards d’ouguiyas.
Toutes ces actions ont été financées par une augmentation de capital de 373 millions, un endettement bancaire de 578 millions, le reste par les fournisseurs d’exploitation qui ont soutenu très fortement la compagnie au cours de cette période.
Naturellement, il est évident que les difficultés de la compagnie résident dans le fait que les investissements et d’une manière générale les emplois à long terme ont été financés par les ressources à court terme et qu’il fallait impérialement rétablir l’équilibre financier de la société en recherchant des ressources stables (augmentation de capital, emprunts à long terme) ?
Il y avait lieu aussi de prendre des ressources indispensables de nature à garantir la consolidation des acquis difficilement obtenues, surtout qu’il a été prouvé de manière irréfutable que la compagnie est capable d’assurer la desserte de Paris plusieurs fois par semaine.
C’est ainsi qu’à l’occasion de tous les conseils d’administration et de tous les comités interministériels consacrés aux difficultés d’Air Mauritanie et souvent présidés par le Premier Ministre de l’époque, Moustapha Ould Hamoud a toujours demandé et insisté pour la prise des mesures devant garantir la pérennité de l’activité d’Air Mauritanie.
Au cours du Conseil d’administration de septembre 2004, Moustapha Ould Hamoud a demandé une augmentation de capital de 1,8 milliard et un emprunt à long terme de 2,6 milliards ainsi que la prise des mesures suivantes :
- prise en charge par l’Etat de la dette de l’Asecna,
- mise en place d’un mécanisme pour la prise en charge par l’Etat de l’augmentation du carburant si la variation du prix de celui-ci venait à dépasser 10%.
- Une finalité spécifique au transport aérien à l’instar de celle dont bénéficient les compagnies concurrentes dans leurs pays (Air Sénégal, Royal Air Maroc, Tunisair, air France,…),
- Orientation vers la compagnie de toutes les missions de l’Etat sachant qu’air Mauritanie a conclu des accords interlines avec la plupart des compagnies.

Constatant que l’augmentation de capital n’a été que de 600 millions d’ouguiyas, Moustapha Ould Hamoud a écrit au ministre de l’équipement et des transports pour demander à l’Etat de se substituer aux actionnaires privés qui n’ont pas suivi l’augmentation de capital et d’engager la mise en œuvre des autres mesures en précisant dans ce courrier que si ce plan n’est pas exécuté dans son intégralité, la compagnie déposera le bilan et tout ce qui sera fait par la suite ne servira plus à grand-chose.
Prenant acte que les pouvoirs publics tardent à réagir à ce courrier, il a pris la décision de quitter la compagnie afin de mettre ces derniers devant leurs responsabilités.
Au cours de la gestion de son successeur Yahya Ould Ahmed El Waghf, il a été démontré, en étroite collaboration avec l’Etat, que le seul moyen d’assurer la pérennité de la compagnie était de trouver un partenaire stratégique qui accepte de prendre une participation majoritaire dans la société, afin d’y apporter les ressources financières l’expertise dont elle avait grandement besoin.
Aussi, l’ensemble des actionnaires réunis en assemblée générale extraordinaire le 03 août 2006 ont mandaté l’Etat, à sa demande, pour la recherche d’un actionnaire de référence dit partenaire stratégique qui pourra contrôler plus de 50% du capital et au profit duquel tous les actionnaires ont accepté de renoncer à leurs droits de préemption et de blocage.
En plus des efforts visant à maintenir l’activité de la compagnie avec un minimum de pertes, tous les actionnaires ainsi que l’Asecna, ont accepté de capitaliser leurs créances, ce qui a permis de rétablir l’équilibre du bilan.
La nouvelle structure née de cette capitalisation fait de l’Etat le premier actionnaire (309% du capital). Il lui sera confié par la suite et jusqu’à la liquidation, la présidence du Conseil d’administration et la direction générale.
Tous ces efforts ont abouti à convaincre la Royal air Maroc d’accepter de rentrer dans le capital d’Air Mauritanie à hauteur de 51% et d’assurer sa gestion en attendant la signature des conventions de participation.
Des accords ont été signés dans ce sens avec la compagnie marocaine par le ministre des transports Bâ Ibrahima Demba et le Directeur général d’Air Mauritanie Yahya Ould Ahmed El Waghf.
Le gouvernement de la transition a malheureusement fait volte-face en septembre 2006 et a autorisé l’octroi de droits de trafic à une nouvelle compagnie dénommée Mauritania Airways et ceci en contradiction avec les accords signés avec la Royal Air Maroc.
Cette décision remettait bien évidemment en cause toute la stratégie et les efforts consentis et pour cette raison, Yahya Ould Ahmed El Waghf informera aussitôt le ministre des transports et le Président du Conseil d’Administration de sa décision de démissionner.
Il est important de noter que dans cette affaire, Air Mauritanie a raté une occasion unique car la Royal Air Maroc avait accepté de prendre la majorité du capital de la société sans exiger une restructuration préalable comme elle l’a systématiquement fait lors de ses prises de participation dans certaines compagnies de la sous région.
Bien que les actionnaires aient de nouveau donné les pouvoirs les plus étendus à l’Etat pour définir et engager les mesures nécessaires à la sauvegarde de la société (PV assemblée générale extraordinaire du 05 août 2007), ce dernier n’a pas honoré les engagements pris lors de la mise en place du nouveau management en fin juillet 2007, ce qui a conduit à l’arrêt de l’activité de la compagnie.

La Commission chargée du suivi des membres du FNDD détenus
 


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