Sidi et les parlementaires (in)dépendants : Histoire d’un démocrate poussé à bout   
02/07/2008

« (…) Je n’hésiterai pas à prendre cette décision s’il m’apparaît que cela est nécessaire pour redresser la situation, consolider la démocratie et éviter que les immenses espaces de liberté ne soient détournés de leur objectif et exploités aux fins de blocage de l’action du Gouvernement et de dégradation de l’image de l’institution législative.»



Jamais les mauritaniens, y compris dans son entourage, ne croyait le Président Sidi ould Cheikh Abdallahi capable d’une telle fermeté et d’une telle détermination. L’homme est, en effet, connu pour être d’une douceur légendaire, conciliant et profondément démocrate. D’où lui vient donc ce sursaut de volonté et de fermeté face aux députés frondeurs ? D’où lui cette audace et cette témérité de faire face à la fois aux généraux qui, aux dires des dirigeants de la fronde parlementaire eux-mêmes, régentent la rébellion à partir de leurs casernes ?
Il faut remonter à la période de transition pour comprendre comment le Président de la république a été poussé à bout.

Les (in)dépendants d’Ely

A l’époque, on s’en souvient, les militaires au pouvoir ont décidé de démanteler le PRDS de Ould Taya pour l’empêcher de revenir aux affaires. Ils ont appelé les notables et les principales figures de ce parti et leur ont demandé de se présenter comme indépendants. Ce fut la ruée, à telle point qu’Ely Ould Mohamed Vall et se pairs durent intimer à certains de rester dans ce parti moribond, dont même le Secrétaire général se préparait à jeter la toge.
L’assemblée nationale en a hérité de plus de 42 députés sans parti, communément appelés (in)dépendants d’Ely. Ces députés ont soutenu, pour la plupart le Président Ould Cheikh Abdallahi, sur ordre, dit-on d’une partie du CMJD incarnée par les généraux Abdel Aziz et Ghazouani.

Ils soutiennent Sidi, puis se lancent dans la surenchère…
Après la victoire de Sidi, ils se présentèrent tous au guichet, revendiquant qui un poste gouvernemental, qui une société d’Etat, qui encore une autre prébende. Le Président eut du mal à les convaincre de rester au Parlement dont ils revendiquent aujourd’hui la légitimité. Pour résoudre cette première crise, il dut former un gouvernement de technocrates avec Zeine Ould Zeidane. Expérience absurde, qui lui valut une année en perte sèche, au cours de laquelle les députés (in)dépendants firent entendre leur voix rebelle plus d’une fois, notamment en menaçant de ne pas voter le budget de 2007 si leurs salaires n’étaient pas doublés. Ils obtirent alors une amélioration importante de leur paie.

ADIL, nouvelles surenchères

Juste après, ils reviennent à la charge lorsque, soucieux de les regrouper et de les organiser, le Président de la République leur conseilla de former un parti, dont il refusa, jusqu’à présent d’être membre, afin de rester au-dessus des formations politiques.
Dès la création de ce parti, ils se ruèrent sur le gouvernement de O. Zeidane et se mobilisèrent pour demander la formation d’un gouvernement politique. Le Président, qui depuis longtemps mûrissait un changement accepta de se plier, encore une fois aux injonctions de sa majorité, qui lui faisait désormais plus de torts politiques que son opposition. La conduite du gouvernement 2 de l’ère Sidi est confié au Parti Adil, que les parlementaires (in)dépendants ont créé.
A peine nommé, ils prirent ce gouvernement pourtant dirigé par le Président de leur parti lui-même en joue. Pourquoi ? «C’est un gouvernement de la gabegie» clament-ils, alors que parmi les signataires de leur motion de censure on compte plus d’un symbole de la gabegie. «Les généraux n’ont pas été consultés » disent-ils parfois. Alors que le Président n’est nullement obligé de consulter les généraux pour former son gouvernement et que les généraux n’ont d’ailleurs jamais évoqué ce sujet. « Les soutiens du Président pendant la campagne ont été écartés au profit de ses opposants », alors que le Président est désormais le Président de tous les mauritaniens et que, aujourd’hui, il vaut mieux pour nous, être gouvernés par une large majorité que par une petite.

Le Président n’en peut plus…

Les députés de Adil ont poussé le Président au bout de sa patience, ils rendent le pays ingouvernable et tout cela pour leurs intérêts propres. Ils n’ont aucun programme, aucun reproche valable pour se jeter dans ce bras de fer inutile. Le Président, visiblement, n’en peut plus des caprices de ces députés sans engagement politique, ni appartenance idéologique. Il a décidé de leur faire face. Avec courage et détermination.
Que vont-ils faire maintenant ? Le Président a été clair : S’ils votent une censure du gouvernement, il dissoudra l’assemblée. Et ils iront aux urnes et le peuple mauritanien n’en élira aucun. C’est certain. Et s’il élisait l’opposition ? Le Président Sidi gouvernera avec elle. Car, en démocrate respectueux de ses principes et de son peuple, il se pliera à la volonté des citoyens. A moins que, comme ils s’y emploient jour et nuit, ils convainquent les généraux à prendre le pouvoir par les armes. Mais ça, c’est une autre histoire.

Dahada Ould Moctar


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