La ville de Rosso traîne une mauvaise réputation. C’est celle de «capitale des moustiques». Cette image peu flatteuse lui vient de paramètres géographiques qui en font le réceptacle grandeur nature des eaux pluviales qui maintiennent pendant les longs mois de la période hivernale l’écrasante majorité des populations, les pieds dans l’eau et à la merci des affres du paludisme.
Cette situation est en passe de basculer dans le domaine du passé, si l’on en juge les travaux titanesques de canalisations entreprises dans la capitale du Trarza par la mairie locale. La question qui se pose est de savoir si le délai imparti suffit pour la livraison des infrastructures compte tenu de l’hivernage qui se profile à l’horizon.
Rosso est bien méconnaissable ces derniers temps. En effet, pour qui connaît les artères des quartiers de l’Escale, Médine, N’Diourbel et surtout, Satara, l’image offerte ces dernières semaines est bien singulière. En effet, d’où que l’on se trouve, la ville offre l’image d’un gigantesque chantier à ciel ouvert. Partout, de gros engins sont à l’œuvre et des équipes travaillent jour et nuit sur une canalisation générale de la ville. Là où l’on passe, selon que l’on roule en voiture ou que l’on soit à pied, il faut faire des manœuvres pour enjamber ou contourner de gros tas de boue que les camions pelleteuses déposent en boucle dans la ville , les chargeurs, pelles mécaniques, nivelleuses, compresseurs, groupes électrogènes tournent à plein régime. En fait, il s’agit d’une initiative de la commune de Rosso qui, sur financement de la Banque Mondiale a décidé d’en finir avec ce lourd handicap qui faisait que la ville était si enlaidie et submergée par les eaux de pluie qu’une grande partie de ses occupants ne voyaient d’autre alternative que de fuir la ville pendant les longs mois pluvieux pour ne revenir qu’à la belle saison. Pour l’heure, la parole est à la mécanique. Monsieur Abdoul Wahab Fall, debout sous un soleil de plomb, regarde un engin excaver le grand canal contigu au mur de la Moughataa, une escouade de conducteurs et d’ouvriers sont à son écoute. Il donne des ordres et pilote l’avancement des opérations : « Nous travaillons pour le compte de la GEAUR (Générale des Eaux et de l’Assainissement Urbain du Sénégal). Notre entreprise opère en regroupement avec la MIDEP, une entreprise mauritanienne sous la surveillance de l’AMEXTIPE. Il s’agit de édifier des bassins versables pour le drainage et l’évacuation des eaux de pluie de la ville de Rosso. Le travail s’articule en deux phases : celui de l’aménagement du bassin versable de Satara et celui de Rosso ville à travers les localités de N’Diourbel, Médine et le plateau de Rosso Escale. Nous sommes entrain de construire une station de pompage qui se chargera de l’évacuation des eaux de pluies. Nous travaillons 24 heures sur 24. » Il est vrai que les hommes sont bien à l’ouvrage, mais le temps ne semble pas jouer en leur faveur. En effet, la saison des pluies qui s’annonce n’est pas pour apporter la sérénité des hommes sur le terrain. en clair, si une partie des canaux collecteurs d’eau a été recouverte par des dalles en béton, plusieurs autres sont encore béants s’ils ne sont pas encore entrain d’être coffrés. De plus, la terre de Rosso est argileuse et il n’est pas dit que les premières pluies seront absorbées par les innombrables tas de boue qui parsèment la ville de bout en bout. C’est le contraire qui est attendu : une disgracieuse retenue d’eau que les populations devront souffrir à vivre. Le délai d’exécution des travaux prévu à la fin du mois de juillet semble bien court. C’est pour cela que bien d’interrogations demeurent posées sur la table : pourquoi avoir engagé des travaux aussi conditionnés aux aléas climatiques seulement en fin avril quand on sait que l’hivernage approche ? Ne risque-t-on pas de rendre la tâche plus complexe en cas d’inondation des fosses et canaux découverts ? En attendant, les équipes sur le terrain continuent à forer et à déverser des tonnes de boue dans le plus grand stoïcisme. Biri N’Diaye
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