A cette fin, l’Etat a mis en place une législation moderne et attractive pour
les investisseurs étrangers. Il a aussi élaboré un contrat-type de partage de
production pétrolière dont les termes peuvent être négociés par les parties, Ã
charge pour le Gouvernement de les soumettre à l’approbation du Parlement.
Une large diffusion a été donnée à ces textes pour que les entreprises
intéressées en prennent connaissance. C’est dans ce cadre général que la société
Woodside a passé des contrats de partage de production sur les zones A, B et C
du bassin côtier. Ces contrats ont été dûment signés par les différentes parties
avant d’être approuvés conformément à la loi. La procédure prévue, selon
laquelle le contrat doit être préalablement signé par les deux parties, était
donc largement connue de Woodside. Aujourd’hui, Woodside se prévaut, de
façon inopinée, de quatre avenants aux Contrats de Partage de Production établis
en violation de la procédure légale et des usages. Il s’agit des documents
intitulés: 1)" Avenant d’extension N° 1 du CPP , Zone B"; 2)" Avenant
d’extension N° 2 du CPP, Zone A"; 3)" Avenant d’extension N° 1 du CPP, Zone
C relatif au Bloc 2"; 4)" Avenant d’extension N° 1 du CPP, Zone C relatif au
Bloc 6". Dès que le Gouvernement en a eu connaissance, il a aussitôt mené
des investigations approfondies pour déterminer dans quelles conditions ces
documents ont été signés et approuvés et quelles en sont les incidences. Ces
investigations ont établi que les avenants invoqués sont entachés de graves
irrégularités et qu’ils causent un préjudice énorme à l’intérêt national.
Pour ce qui est des irrégularités, il y a lieu de souligner, à titre non
limitatif, les éléments suivants: 1) la loi autorisant l’approbation des
quatre "avenants" date du premier février 2005, alors que Woodside ne les a
effectivement signés que le 14 février de la même année, soit deux semaines
après la promulgation du texte législatif. Quant au ministre des Mines et de
l’Industrie, sa signature n’a été apposée, sur deux au moins des avenants, que
le 2 mars 2005. Même postérieurement à cette date, un échange de
correspondances entre le ministre et Woodside transmettait encore les mêmes
avenants, au stade de projet pour signature. 2) Aussi bien devant le Conseil
des Ministres que devant le Parlement, les "Avenants" ont été présentés comme de
simples avenants d’extension de durée de validité. Or, le contenu des avenants
est tout autre. Il existe, en effet, un décalage d’une ampleur extrême entre cet
objectif supposé des "avenants", expressément repris par la loi du 1er février
2005 dans son intitulé, et leur objectif réel qui consiste en une modification
substantielle du contenu des Contrats de Partage de Production, dans l’intérêt
exclusif de Woodside. Pour ce qui est du préjudice, et sans que l’inventaire
ne soit exhaustif, les clauses des "avenants", aujourd’hui invoqués par
Woodside, emportent les conséquences suivantes: - la baisse de la quote-part
de l’Etat dans le profit-oil pour certaines zones, - l’allégement des
contraintes en matière de protection de l’environnement, ce qui implique la mise
en péril de nos faune et flore maritimes et la pérennité de nos ressources
halieutiques, - la réduction de l’impôt de 15 points dans certaines zones,
- l’attribution d’un monopole d’exploration et d’exploitation, plusieurs
années de plus, sur une grande superficie, -la suppression de l’imposition
des plus values de cession des éléments d’actif, - l’autorisation de la
déduction illimitée dans le temps des déficits reportés, - le recouvrement
immédiat des coûts des forages d’appréciation, - les coûts d’abandon
dorénavant imputés en partie à l’Etat, - la possibilité pour Woodside de
passer des marchés de gré à gré pour l’acquisition de biens et services rentrant
dans le cadre de l’activité pétrolière du contractant et qui sont des coûts
pétroliers recouvrables, donc imputables en partie à la Mauritanie, avec tous
les risques d’abus que cela comporte, -la réduction de l’obligation de
réaliser deux forages d’exploration à un seul dans certaines zones, -la
modification de la méthode de tenue des comptes du contractant par la
centralisation des originaux en Australie avec seulement une copie non
électronique en Mauritanie, -le recouvrement sur le CPP zone B des coûts du
puits Chinguitt 1, considéré initialement comme obligation de la zone A,- -la
déduction des charges qui ne sont pas directement affectées à la conduite des
opérations pétrolières, -la suppression de l’interdiction de vendre le
pétrole ou le gaz mauritanien à des pays déclarés hostiles à la Mauritanie,
-l’allégement des procédures de la cession à une société affiliée au
contractant, -la possibilité pour le contractant et ses sous-traitants de
faire appel pour leur couverture d’assurances à des compagnies étrangères au
détriment des assureurs nationaux, -la suppression de la garantie de bonne
exécution. Sans tenir compte de l’incommensurable impact des dits "avenants"
sur l’environnement et la ressource halieutique, le préjudice financier pour
l’Etat mauritanien se chiffre à des centaines de millions de dollars US. Cette
estimation n’est qu’approximative; le volume définitif du préjudice sera
déterminé ultérieurement par voie d’expertise. L’affaire est donc d’une
particulière gravité. Le gouvernement mauritanien a donné officiellement Ã
Woodside avis de sa position. Il l’a invitée à préserver un partenariat
transparent et mutuellement bénéfique, fondé sur le respect de la loi et des
engagements souscrits de bonne foi. Il ne peut accepter l’opposabilité d’actes
passés en violation délibérée de la procédure et ne comportant que des clauses
conçues dans l’intérêt exclusif d’une seule partie. Toute autre position
ouvrirait la porte à l’enracinement des pratiques malsaines qui saperaient le
cadre juridique des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures
dans notre pays et compromettraient de manière irréversible l’intérêt public.
L’édification de l’Etat de droit commande la soumission de tous à la loi.
Les entreprises étrangères qui entendent contracter avec la Mauritanie se
doivent de respecter les procédures légales dont elles n’ignorent pas le
contenu, en particulier lorsque celles-ci leur avaient déjà été appliquées Ã
plusieurs reprises. Tous ceux qui ont prêté la main à une violation de la
loi doivent répondre de leurs actes devant les tribunaux. A ce titre, une
information judiciaire a été ouverte contre l’ancien ministre des Mines et de
l’Industrie et ses complices pour faux en écriture publique et autres
infractions à la loi pénale. Sur un autre registre, l’Etat mauritanien a
notifié à Woodside l’existence d’un différend après qu’elle eut refusé de
répondre de façon constructive aux efforts qu’il a déployés -un mois durant par
échanges de correspondances et appels aux réunions- pour ne pas rendre ce
contentieux public et lui trouver une solution dans le cadre d’un partenariat
solide et transparent. En tout état de cause, le gouvernement mauritanien,
comme l’a déclaré solennellement le Président du Conseil militaire pour la
justice et la démocratie, chef de l’Etat, prendra toutes les mesures adéquates
pour la protection des intérêts supérieurs de la Mauritanie".
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