Le prĂ©sident de la HAPA dit que les medias publics sont minables   
11/05/2011

L’honorable Mohamed Haibetne Ould Sidi Haibe, président de la Haute Autorité pour la Presse et l’Audiovisuel (HAPA) a déclaré que les medias publics sont minables (en arabe, wadhi’a) . M Ould Sidi Heiba s’exprimait lors de la journée de concertation



...sur les cahiers de charges des services audiovisuels, organisĂ©e le 11mai. Devant le tollĂ© soulevĂ© par cette dĂ©claration pourtant juste, honnĂŞte, exacte et pertinente la HAPA s’est empressĂ©e d’envoyer une dĂ©claration aux rĂ©dactions dans laquelle elle affirmait que son prĂ©sident parlait plutĂ´t de la situation des medias publics. Minable, elle aussi ?

T. Ould Bilal

 

Voici l’excellent discours prononcĂ© par le prĂ©sident de la HAPA :

 

"Je voudrais d’abord vous remercier d’avoir accepté de participer à cette journée de concertation sur les prototypes de cahiers de charges des services audiovisuels, préludes à la mise en oeuvre de la loi n° 045-2010 relative à la communication audiovisuelle.
Avant de livrer quelques éléments de réflexion sur le sujet, il me plaît de remercier également l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) pour l’appui financier accordé à la Haute Autorité de la Presse et de l’Audiovisuel (HAPA) en vue d’élaborer cette étude importante. Nos remerciements vont ensuite à la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA) du Royaume frère du Maroc qui a mis à notre disposition l’un de ses meilleurs experts en la personne de Monsieur Yassine Charif, juriste et spécialiste de l’audiovisuel et de la régulation ici présent.
Ce partenariat triangulaire s’inscrit dans le cadre de l’action du réseau des instances francophones de régulation (Refram) auquel appartiennent la HAPA et la HACA et qui bénéficie du soutien de l’OIF.
L’élaboration de cahiers de charges et de procédures et leur mise à la disposition des autorités et du public dans les délais requis constituent certes un événement attendu avec impatience depuis longtemps, et parfois avec une certaine fébrilité. Elles vont ainsi marquer le démarrage effectif de l’application de la loi 2010-045 dont la promulgation ouvre de nouvelles perspectives dans le secteur audiovisuel et représente un acquis considérable pour le renforcement de la liberté d’expression, du pluralisme et de la diversité. Cette loi vient s’ajouter à l’arsenal juridique existant, le complétant et l’enrichissant. Elle aura, entre autres impacts, la fin du monopole étatique sur l’espace audiovisuel, l’introduction de la concurrence pour une plus grande accessibilité aux médias et une meilleure qualité des produits et services offerts au public, l’existence de médias publics, privés et associatifs, et une décentralisation de ceux-ci au profit de l’intérieur du pays (médias de proximité).
Mais la mise en œuvre de cette loi sera confrontée à de nombreuses contraintes et à des défis non négligeables. La promotion d’un environnement médiatique caractérisé par la liberté d’expression, le pluralisme et la diversité requiert un ensemble de conditions que la Mauritanie est loin de remplir pleinement aujourd’hui. Parmi ces critères, répertoriés par l’Unesco comme indicateurs de développement des médias, il y a le cadre légal et politique, les ressources humaines, la capacité infrastructurelle, un cadre économique dans lequel tous les acteurs sont en situation d’équité concurrentielle et transparence de la propriété, un système de régulation favorable à la liberté d’expression, au pluralisme et à la diversité.
Dans tous ces domaines, l’on sait que les déficits sont criants même si l’on peut noter un léger progrès en matière de législation et de choix politiques. En effet, la Mauritanie appartient malheureusement encore au club peu enviable des pays dont le sous-développement et la pauvreté restent le lot quotidien.
Nous avons aussi une société en crise depuis longtemps, ballottée entre instabilité politique et mauvaise gouvernance, déstructuration sociale, perte de valeurs et de repères, etc...
La dimension la plus dramatique et la plus destructrice de cette crise multiforme est la faillite du système éducatif, l’effondrement de l’école mauritanienne. Le spectacle lamentable que donne aujourd’hui l’Université dévoyée de Nouakchott en est la parfaite illustration.
Le secteur de la communication n’échappe pas à cette triste réalité, et ce en dépit des efforts louables déployés par la plupart des acteurs. Cet état de choses se reflète dans la précarité et l’insolvabilité de la presse et la médiocrité des médias officiels.
Ce jugement ne relève pas de l’auto-flagellation ni d’un pessimisme de mauvais aloi, mais d’un constat amer général. La mise en œuvre de la Loi sur la communication audiovisuelle va imposer aux médias officiels un certain nombre de défis à relever. Le changement de leur statut et de leurs missions actuels devra aboutir à leur transformation en véritables médias de service public et touchera tous les aspects de leur fonctionnement: nomination, recrutement, gestion, formation, programme, relation avec le gouvernement, les acteurs nationaux, le public, etc....
Cela impliquera une rupture définitive avec les mentalités et les pratiques d’antan, faites de pensée unique, de langue de bois, de médiocrité, de culte pitoyable de la personnalité, de propagande contre-productive, etc...
Pour affronter la concurrence, ils doivent miser sur les meilleurs produits et services Ă  offrir au plus grand nombre possible.
Ces changements interpellent également les médias privés et associatifs qui vont naître et qui doivent respecter leurs obligations et servir l’intérêt général. Une complémentarité positive doit être encouragée entre ces deux pôles médiatiques. L’existence d’un système de régulation garantissant la liberté d’expression, le pluralisme et la diversité est de nature à contribuer à l’émergence de médias crédibles, modernes et performants.
La loi 045-2010 attribue à la HAPA de nombreuses prérogatives dont, entre autres, l’élaboration de cahiers de charges et leur application.
La HAPA fait partie du paysage politique et médiatique du pays. Son existence, malgré ses insuffisances, est un acquis précieux pour la démocratie. Née dans un contexte de crise, un environnement professionnel et technique très difficile, elle est confrontée à de nombreux handicaps: faiblesse des moyens humains et matériels, inexpérience, absence de siège approprié, incompréhension et hostilité de certains milieux.
La libération de l’audiovisuel constitue pour elle un nouveau défi, et l’élaboration de cahiers de charges n’en est que le début. Elle doit être dotée des moyens nécessaires à l’accomplissent de sa complexe et difficile mission.
La régulation est au coeur de la démocratie, de la citoyenneté et du développement. Le développement du secteur de la communication est tributaire du développement global du pays. Ce dernier passe nécessairement, surtout dans la conjoncture actuelle, par la mise en ouvre de profondes réformes, en premier lieu sur le plan institutionnel et politique. La nécessité impérative de ces réformes ne relève pas seulement d’une volonté politique, mais aussi et surtout d’une exigence démocratique, du droit des peuples à la liberté, à la dignité et au bonheur".

 


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