La détention du Premier ministre constitutionnel viole la constitution, affirme un célébre avocat   
18/03/2009

La procédure judiciaire engagée contre le Premier ministre mauritanien constitutionnel  Yahya Ould Ahmed Waghf, écroué depuis quatre mois dans deux affaires, «viole» la Constitution  puisque seule une Haute cour de justice peut le juger, a affirmé le 18 mars  son avocat. "La Constitution a prévu une Haute cour de justice pour juger le président, le Premier ministre et les membres du gouvernement qui ne peuvent être entendus par des juridictions ordinaires" a indiqué  le célèbre avocat Me  Brahim Ould Ebetty, lors d’un point presse.



 "Par conséquent, l’arrestation de Ould Ahmed Waghf sur ordre du parquet est une violation de la loi fondamentale", a-t-il ajouté. Yahya Ould Ahmed Waghf le  Premier ministre constitutionnel  a été destitué, le 6 août 2008, par le coup d’Etat militaire qui a renversé le premier  président démocratiquement  élu de Mauritanie, Sidi Ould Cheikh Abdallahi.  Ould Ahmed Waghf avait ensuite été inculpé dans une affaire politicienne et décousue concernant la livraison de riz "avarié" pour un programme d’intervention d’urgence lorsqu’il dirigeait le gouvernement. Sa défense fait valoir qu’il n’avait fait que "signer un marché pour conformité" et que seuls le fournisseur et les responsables directs de la transaction devraient être inquiétés.  Ould Ahmed Waghf est également poursuivi avec quatre autres personnes dans l’affaire Air Mauritanie, et accusé d’avoir "manigancé la faillite" de la compagnie nationale dont il avait été le directeur général. Son avocat a affirmé que durant sa gestion d’Air Mauritanie, M. Ould Ahmed Waghf avait conclu un accord avec Air Maroc pour redresser la compagnie, mais que les autorités militaires de transition (2005-2007) avaient préféré autoriser une nouvelle compagnie (Mauritania Airways, privée), entraînant le départ des Marocains. "Le Premier ministre a été interpellé en homme politique opposé au régime, et non pour sa gestion des affaires" a plaidé Me Ould Ebetty. Un sentiment largement partagé par les mauritaniens honnêtes. Ci-dessous le communiqué de presse rendu public par le collectif de défense du premier ministre constitutionnel aujourd’hui diabolisé par la junte.

 

Collectif de la Défense du Premier Ministre Yahya Ould Ahmed Waghf
Dossier 1104/RP/08 dit Dossier CSA : Communiqué de Presse


Quatre (4) mois après la détention du Premier Ministre - Yahya Ould Ahmed Waghf – à la prison de Dar Naim après une première comparution devant le juge - unique à ce jour – le dossier communément appelé Dossier CSA demeure pendant sans le moindre acte, comme si l’objectif recherché par le déclenchement de cette procédure d’abus de pouvoir consiste à incarcérer un adversaire politique comme l’identifie la note intitulée «sur la mise à profit de la procédure de liquidation d’Air Mauritanie» qui restaure une technique propre aux pratiques de la police politique contre les adversaires de ceux qui gouvernent.

Ainsi le caractère politique de la poursuite, la violation de la loi et l’abus de pouvoirs caractéristiques de la détention du Premier Ministre que le pouvoir exécutif traite en adversaire politique - même à travers les procédures judiciaires- se présentent par les principales données suivantes :

- Alors que le dossier porte sur un marché administratif conclu entre le CSA et un fournisseur privé qui stipule la bonne qualité du produit vendu et au lieu d’interpeller, pour protéger les intérêts de l’Etat, le vendeur pour répondre de son obligation de garantie, la poursuite est exercée, sans fondement aucun, contre le Premier Ministre qui avait apposé son approbation sur le marché en raison du niveau de la transaction.

- En dépit de la campagne largement orchestrée à tous les niveaux pour la formation de la Haute Cour de Justice et après sa formation effective, il s’en est suivi, au mépris des membres de cette cour et du Groupe des Parlementaires qui avait uni ses efforts pour sa création, la violation flagrante de la constitution et de la loi portant organisation de la Haute Cour de Justice, alors que la formation de cette Cour était présentée, en son temps, par le groupe des parlementaires comme problème majeur n°1 du pays.

- Aux motifs que le Premier Ministre - Yahya Ould Ahmed Waghf – était investi de ses fonctions de Premier Ministre de mai 2008 au coup d’Etat du 06/8/2008, toute poursuite à l’occasion de l’exercice de ses fonctions est de la compétence exclusive, en application de la constitution, de la Haute Cour de Justice et ne peut faire l’objet d’actes de procédure établi par la Police Judiciaire, ou par le Procureur de la République ou par le Juge d’Instruction parce que exclue de la compétence des juridictions de droit commun, le marché conclu entre le CSA et le fournisseur privé ayant été approuvé le 02/7/2008 sans que cette approbation puisse constituer un fondement des poursuites de son auteur.

En considération de ces données extraites d’une lecture conjuguée des prescriptions de la constitution et de la loi portant création de la Haute Cour de Justice, la défense interpelle l’opinion publique, la prend à témoin et exige :

1- Le respect de la constitution et de la loi portant création de la Haute Cour de Justice en ses dispositions qui proscrivent toute poursuite du Premier Ministre devant les juridictions de droit commun relativement à des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions parce que de la seule compétence de la Haute Cour de Justice

2- La mise en garde contre la violation par le Président du Haut Conseil d’Etat du principe de séparation des pouvoirs et tentative d’influencer le fonctionnement de la justice par ses déclarations à Rosso et à Akjoujt
3- La cessation de l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques au préjudice des adversaires politiques

4- La prise de conscience par les parlementaires, premiers concernés par le statut de la Haute Cour de Justice, de leur rôle d’imposer et de faire respecter les procédures de la Haute Cour de Justice

5- Le respect par le pouvoir exécutif des principes de séparation des pouvoirs et l’abstention de toute immixtion dans la répartition des compétences entre les juridictions

6- Le respect des droits de la défense consacrés et protégés par la législation interne et par les instruments internationaux ratifiés par notre pays par la fin des poursuites illégales exercées contre le Premier Ministre.

Nouakchott, le 18 mars 2009

La Défense


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