Ouvert il y a quelque temps, le Centre Guide pour la Migration (CGM) parrainé par la Confédération Générale des Travailleurs de Mauritanie (CGTM), en partenariat avec l’Agence Espagnole pour la Coopération Internationale (AECI), l’Institut Syndical pour la Coopération et le Développement (ISCOD) et d’autres organisations syndicales, a organisé à Nouakchott, du 22 au 24 janvier courant, un séminaire de formation sous le thème «rôle du Syndicat dans la défense des droits de la main d’œuvre migrante».
Ce semainaire est organisé au profit des associations de migrants résidant en Mauritanie. Une rencontre qui a constitué un cadre d’échanges entre les syndicats et les représentants des associations de migrants, ressortissants des pays frères et amis, notamment de la Gambie, de la Guinée, du Mali, du Sénégal … entre autres. L’objectif visé était de créer un cadre de concertation à travers lequel, ce centre d’orientation et de sensibilisation peut aider les travailleurs migrants par le biais des syndicats à défendre leurs droits dans le cadre de l’exercice de leurs métiers. Cela a été une opportunité pour ce centre, de procéder à l’ouverture et au lancement de ses activités. En présence des représentants des chancelleries des pays cibles, le coordinateur du centre, M. Mamadou Niang a saisi l’occasion, pour dire que son centre « constitue un cadre privilégié de concertation, d’échanges, d’orientation et de sensibilisation de la population migrante » en ce qui concerne leurs conditions de séjour en Mauritanie. A cet effet, il invitera les participants au séminaire à un débat franc afin de pouvoir identifier et recenser les problèmes de la main d’œuvre migrante, de dégager clairement les axes de collaboration et les perspectives d’avenir. Aux ong de défense des droits de l’homme et de la société civile, l’Organisation Internationale pour la Migration (OIM) présentes à cette occasion, il leur invitera à plus d’écoute afin de saisir la quintessence des échanges qui en découleront des débats. Quant aux représentants des migrants, il leur a été demandé de décliner leurs attentes par rapport au centre afin de créer une synergie d’actions dans l’optique d’une défense légitime de leurs droits. Ainsi, durant trois jours, les participants ont parcouru toutes les facettes de la migration sous toutes ses formes. La question de l’immigration clandestine n’a pas été en reste. Les formateurs ont saisi cette opportunité pour revisiter les législations européennes en matière d’immigration. Loin d’encourager les candidats à l’immigration, les formateurs par des exposés précis et concis, ont sensibilisé les participants à mieux préparer l’immigration et de dissuader les candidats qui ne remplissent pas les conditions requises. Ces journées ont permis aux responsables du Centre de faire un diagnostic clair et précis des problèmes des migrants et de cerner le champ d’implication des syndicats afin de leur permettre de jouer pleinement leur rôle dans la défense des droits de la main d’oeuvre migrante. Des communications importantes relatives aux travaux forcés et la traite des personnes ainsi que sur la question de l’esclavage, ont été faites par des experts formateurs dont l’expertise dans le domaine était avérée. Des ong de droits de l’homme en ont profité pour exposer sur les problèmes de l’esclavage et la loi le criminalisant. A l’issue du séminaire, les participants ont formulé des recommandations relatives à la collaboration entre migrants et syndicats, la vulgarisation des textes régissant les mouvements migratoires et leur emploi, la mise en place d’un programme d’appui aux migrants etc.. Pour les représentants des associations de migrants, « cela constitue une aubaine que nous devons saisir pour aider nos compatriotes à trouver des solutions aux problèmes liés à l’exercice de leurs emplois qui se posent à eux. Nous trouvons par là une occasion de créer un cadre de dialogue entre nous et les syndicats mauritaniens, dans le cadre de la défense de nos droits. Nous n’attendions pas à cela mais nous ne pouvons que remercier nos partenaires du centre», déclare Nouha Sané, vice président chargé des affaires sociales au niveau de l’association des ressortissants Sénégalais. Pour Amadou Barry de la communauté guinéenne, «ce séminaire nous a permis d’avoir une idée claire des droits et des devoirs des migrants en Mauritanie. Les débats étaient aussi ouverts et francs. Nous avons trouvé des interlocuteurs disponibles à nous accompagner dans la défense de nos droits et nous nous en réjouissons». Ibou Badiane Encadrés : Le Coordinateur sur l’initiative … L’idée remonte en 2005. La confédération Syndicale Internationale lors de son congrès en 2005 à Miyazaki au Japon, avait adopté une résolution spéciale visant à renforcer la capacité de ses ateliers partout dans le monde par rapport à la défense des droits des travailleurs migrants, avait-il indiqué. «Cela nous a permis d’avoir un programme pilote qui visait dans un premier temps une collaboration avec la CGTM de Mauritanie et la CNTS du Sénégal. J’ai eu à coordonner ce programme entre les deux centrales syndicales. Ensuite, en second lieu, nous avons obtenu la collaboration avec nos amis espagnols de l’Union Générale des Travailleurs d’ Espagne (UGTE), à travers son Ong Institut Syndical à la coopération et au développement (ISCOD). Nous avons signé une convention de 4 ans pour l’ouverture d’un centre guide qui est aussi une réponse par rapport aux préoccupations de la confédération syndicale internationale » explique-t-il. « L’Iscod travaille également avec les latino-américains qui ont des centres au Costa Rica, à Dakar et au Maroc. Donc ce centre a pour vocation d’orienter et de sensibiliser le travailleur migrant parce que nous pensons aujourd’hui que cette filière d’immigration est entretenue par des réseaux à but lucrative mais très dangereux pour la survie des travailleurs migrants », renseigne-t-il. Et de poursuivre, «comme la population qui migre est comprise entre 15 ans et 45 ans, donc, nous considérons que c’est la force vive du travail. Les syndicats ont compris que c’est un devoir de contribuer à une meilleure gestion de cette question de l’immigration ». Sur le rôle principal du centre, «nous allons contribuer à assurer la défense des droits des migrants travaillant en Mauritanie car cette catégorie de travailleurs est confrontée à des difficultés liées à leur statut de migrants. Il s’agit de la défense de leurs droits, la sensibilisation sur la législation mauritanienne en matière d’emploi et toute autre assistance que le centre leur apportera au besoin. Aussi le centre va apporter des informations, sensibiliser les travailleurs candidats éventuels à l’immigration». Des informations sur les législations européennes en matière d’immigration et sur le marché de l’emploi sont également du ressort du centre. A la question de savoir comment les syndicats comptent défendre les travailleurs migrants sachant que la majeure partie de ces derniers travaille dans l’informel, M. Niang a déclaré : « nous avons déjà dans un autre programme de la CGTM, nous avons initié ce qu’on appelle la syndicalisation des travailleurs de l’informel depuis une année. Ce programme se traduit par la mise en place de comités d’actions dans chaque région. Il s’agit de sensibiliser cette catégorie de travailleurs parce qu’aujourd’hui, nous considérons que le syndicat ne peut plus se développer s’il ne s’ouvre pas aux travailleurs du secteur informel. Tout simplement parce que le secteur formel se rétrécit de plus en plus car l’Etat se désengage du secteur formel. Nous sommes en train de faire un travail se sensibilisation au niveau de ce secteur et c’est sûr que nous toucherons les travailleurs migrants. Mais aussi, par rapport à nos plans d’actions, nous allons impliquer les associations de migrants pour développer une synergie dans le cadre de notre collaboration pour que celles-ci puissent avoir la bonne information. Ce sera soit des partenariats avec des structures syndicales, soit par des circuits syndicaux. Nous verrons en tout cas avec eux ». Par rapport au siège du centre, M. Niang a déclaré que son centre est là pour répondre aux attentes des associations de migrants, notamment par la mise en place de salle de réunion et d’équipements informatiques pour leur faciliter l’accès à l’Internet.
Parole d’expert … Djibril Djigo, consultant et Ă©conomiste de formation supĂ©rieur en commerce international, expert en micro finances, modĂ©rateur du sĂ©minaire, a estimĂ© que «le sĂ©minaire s’est dĂ©roulĂ© dans d’excellentes conditions au vu des rĂ©sultats auxquels nous sommes parvenus et compte tenu de l’objectif de cette rencontre. La rencontre a pour but d’initier un cadre de concertation entre le centre qui vient d’être créé par la CGTM en partenariat avec l’agence espagnole de coopĂ©ration pour le dĂ©veloppement international (AECI). Ainsi, entre les associations de ressortissants de pays Ă©trangers et le centre, le dialogue a Ă©tĂ© nouĂ© et les concertations ont commencĂ©. On espère que cela pourra continuer. Parce que les rĂ©sultats auxquels nous sommes parvenus ont permis d’aboutir Ă la crĂ©ation d’un cadre de concertation entre les parties prenantes. Ça c’est le premier aspect. Le deuxième aspect, c’est la qualitĂ© des dĂ©bats et la ponctualitĂ© des participants qui ont acceptĂ© trois jours durant, de rester et de dialoguer avec nous. Les reprĂ©sentants d’associations ont montrĂ© leur intĂ©rĂŞt par rapport au sĂ©minaire et au centre. C’est extrĂŞmement important. Ce qui a constituĂ© un motif de satisfaction pour le centre. Le troisième aspect, c’est que nous avons rĂ©uni les vĂ©ritables acteurs liĂ©s Ă cette problĂ©matique de la migration. Ce sont des ressortissants Ă©trangers, les syndicats de travailleurs et les ong de droits humains qui sont interpellĂ©s par rapport Ă cette problĂ©matique. Vous n’êtes pas sans savoir que c’est un thème très difficile Ă rĂ©gler qui interpelle tout le monde en rĂ©alitĂ©. Nous avons notĂ© des contributions importantes et cela va permettre d’enrichir le programme d’actions que nous allons mettre en place pour cette annĂ©e 2009 ». Par rapport au contexte politique actuel, M. Djigo, dira que «C’est difficile parce qu’on ne peut pas dissocier cette question politique par rapport Ă la problĂ©matique liĂ©e Ă la migration. Parce qu’en fait, ce qui aurait pu aider Ă rĂ©gler les questions liĂ©es Ă la migration, au statut du migrant, c’est un espace de libertĂ© et de dĂ©mocratie. Malheureusement le pays est en recul depuis un certain temps. Mais en tant que syndicat, je pense que les gens sont habituĂ©s Ă travailler aussi bien dans des situations de recul dĂ©mocratique que dans des situations de dĂ©mocratie. Nous allons continuer Ă faire ce que nous pouvons faire et Ă nous battre dans cette situation mĂŞme si en Mauritanie nous constatons malheureusement que les efforts en matière de dĂ©mocratie qui avaient Ă©tĂ© accomplis ces dernières annĂ©es, ont connu un net recul aujourd’hui». Propos recueillis par I. Badiane
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