La tâche était délicate : officiellement, il faut séduire les fonctionnaires,
les hommes politiques et les opérateurs économiques pour combattre la corruption
et le détournement des deniers publics et préparer la bonne tenue d’élections
libres et transparentes. Pourtant on n’assistera pas au langage de la séduction.
Mais Ă une vigoureuse mise en garde contre la mauvaise gestion, contre le
tribalisme, et pour la restauration des valeurs et de la confiance. Et si le
chef de l’Etat a été direct sur la volonté du CMJD d’en découdre avec les
auteurs des pratiques préjudiciables au pays, il n’en a pas moins dit sur des
questions d’ordre capital. A la question, faut-il avoir des inquiétudes sur
l’après transition? Qu’est ce qu’il a dit sur le dossier? Rien nous semble-t-il.
Dans les cercles intellectuels et officines politiques, d’aucuns se demandent
aujourd’hui s’il ne faut pas s’inquiéter plutôt du rôle de ces militaires du
CMJD au lendemain de l’élection présidentielle de mars 2007. Autrement dit
aussi, pour qui roule le CMJD? Puisqu’en effet depuis la fin des années 70,
l’armée mauritanienne a toujours "veillé" sur la vies politique et économique,
n’hésitant pas à pratiquer le coup d’Etat lorsque la religion érigée parfois en
dogme politique et constitutionnel était mise à mal ou lorsque l’économie et
l’Etat sont au bord de la déliquescence ou de la faillite (l’exemple du 03 août
2005). Quelle est donc l’urgence du moment pour que le "Boss" en appelle à la
propreté dans les pratiques et les transactions entre mauritaniens et vis-à -vis
des investisseurs étrangers?
Un discours constituant, fondateur…mais Ce discours cache-t-il mal des
appréhensions par rapport à un hypothétique retour de Maaouya? D’ailleurs
certains milieux prient tous leurs dieux pour une rentrée au bercail (imminente
selon des indiscrétions) de celui-ci. Par ailleurs, quelques voix dénoncent,
dans des discussions de salon- peu de leaders d’opinion osent s’y coller à gorge
déployée- une classe politique de plus en plus sous tutelle militaire. Elle est
courtisée, ménagée, pour s’attirer ultérieurement ses bonnes grâces. Aux
dernières nouvelles, un "deal" serait conclu entre quelques partis dits
puissants et le CMJD pour un après "transition concertée" Qu’est ce qu’une
partie des membres du CMJD aurait à craindre de l’après transition ? Les dés
sont déjà jetés. Si l’on en croit le patron du Comité Militaire, l’armée
retournera aux Casernes, même si des opinions qualifiées à tort ou à raison de
saugrenues s’expriment ça et là en faveur d’une prolongation de la transition.
Une donnée non moins importante est que si l’on a demandé une prolongation,
c’est sans doute parce que le CMJD a su se constituer un réseau efficace de
partenariats pour débusquer des compétences mauritaniennes éparpillées à travers
le monde, afin de s’entourer d’éminences grises dans tous les domaines de la vie
active. Les faits sont lĂ . Les chiffres plaident pour le moment Ă sa faveur :
concertations consensuelles de la classe politique avec le gouvernement
intérimaire, hausse des salaires de 50 pour cent, baisse du déficit budgétaire,
restitution de centaines de millions détournés Ely et son équipe n’auraient
pas réussi tout cela, s’ils n’étaient pas accompagnés des moyens économique,
politique, social et financier venus du concours des forces vives de la nation.
Ces forces vives ont pour noms : opérateurs économiques, société civile, partis
politiques, syndicats, bailleurs étrangers…pour un dialogue national. Dialogue
auquel ne s’est jamais astreint l’ex-president. La Mauritanie est sur une
bonne vague. Mais il n’est pas tôt de penser à l’après élection. Si l’armée
redevient républicaine et rentre dans les casernes comme prévu,
qu’adviendra-t-il de toutes ces luttes annoncées contre la corruption, contre le
népotisme, le détournement des biens de l’Etat, surtout quand on sait que les
leaders sont tenus de puissants magnats de la finance locale? Est-ce que le
départ des militaires signerait un "come-back" gagnant pour les extrémismes
islamistes ou les particularismes? Que faut-il penser d’ailleurs sur le fait que
la majorité des populations continuer à plébisciter le CMJD comme étant " garant
et promoteur d’une certaine idée et une forme naissantes de démocratie à la
mauritanienne" ? Enfin, jusqu’à quelque point, pourrait-on et doit-on réduire
la force de frappe de l’armée pour qu’elle soit républicaine dans un pays encore
politiquement et économiquement instable? Par El Hadj Popèye
Cissé Cisse25@yahoo.fr
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