Le ministère français des Affaires étrangères a confirmé ce samedi 2 novembre au soir la mort de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, deux envoyés spéciaux de RFI au Mali.
Cela s’est passé à Kidal, au nord du pays, non loin des montagnes où les islamistes d’Aqmi sont pris pour cibles par les militaires de l’opération Serval. Les deux reporters de RFI y ont été enlevés avant d’être vraisemblablement assassinés. RFI ce soir est en deuil. L’antenne a décidé de diffuser de la musique classique à la place de ses programmes habituels. Selon plusieurs témoignages indirects recueillis à Kidal et Bamako, nos reporteurs Ghislaine Dupont et Claude Verlon ont été tués à environ quinze kilomètres à l’est de Kidal, sur la route qui mène à Tin-Essako. Selon nos informations, ils ont été tués peu après leur enlèvement. Nos confrères avaient été capturés à 13H00 TU à Kidal aujourd’hui par quatre ravisseurs qui étaient à bord d’un véhicule pick-up Toyota beige. Ils étaient devant le domicile d’Ambeiry Ag Ghissa, un membre du MNLA, qu’ils venaient d’interviewer. Un représentant du MNLA témoin de l’enlèvement à Kidal Le représentant du MNLA a assisté à l’enlèvement. Il a été alerté par un bruit suspect dans la rue, a entrouvert sa porte et a vu les ravisseurs porter des coups de crosse sur le véhicule de nos deux journalistes. Les ravisseurs, qui étaient enturbannés et parlaient tamashek, ont sommé Ambeiry Ag Ghissa de rentrer chez lui, mais il les a vus embarquer Ghislaine Dupont et Claude Verlon dans leur pick-up. Le chauffeur de nos deux reporters, qui a été forcé de se coucher à terre, a entendu Claude Verlon et Ghislaine Dupont protester et résister. C’est la dernière fois que nos confrères ont été vus. « Je les ai accompagnés jusqu’à la porte. Je leur ai dit au revoir. En rentrant à l’intérieur de la maison, j’ai entendu un bruit bizarre dans la rue. Je suis ressorti », raconte Ambeiry Ag Ghissa au micro de RFI. « Leur voiture était arrêtée. Une autre était arrêtée à côté. Il y avait un monsieur à terre avec une arme. Dès qu’il m’a vu, il a braqué l’arme sur moi. Il m’a dit de rentrer. »
« Je n’ai vu qu’un seul homme. Les gens qui étaient dans la rue ont dit qu’ils en avaient dénombré quatre », rapporte-t-il. L’homme qui a braqué son arme sur lui « ressemblait à tous les hommes d’ici. Il avait son turban, son boubou, son pantalon. Il avait un accoutrement local, tout à fait ordinaire. Il était armé d’une arme automatique », précise Ambeiry Ag Ghissa, qui dit sa « consternation, au moment où les otages occidentaux, en l’occurrence français, ont été relâchés, je m’attendais à un adoucissement. […] Je ne m’attendais pas à une opération comme ça, immédiatement suivie d’une exécution. C’est la consternation générale. » « Ils étaient au moins quatre » Le chauffeur de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon a également livré son témoignage. « Lorsqu’on est entré dans le véhicule, juste quand on a fermé les portières, un pick-up a pris le virage juste devant nous. Il y avait des hommes armés dans le véhicule. Un des hommes est descendu du véhicule, s’est approché de mon côté. Il a braqué son arme sur moi et m’a dit de descendre. Je suis descendu du véhicule. Il m’a dit de me coucher. Je me suis couché. A ce moment, ils ont commencé à attacher les journalistes. Ils leur ont attaché les mains, ils les ont mis dans le pick-up », a-t-il raconté, ce samedi soir, au micro de RFI. Les ravisseurs sont « partis dans le pick-up avec lequel ils étaient arrivés. Ils les ont mis à l’arrière. Ils ont tiré une balle en l’air et puis ils sont partis », raconte le chauffeur, qui préfère rester anonyme. « Claude a résisté », rapporte-t-il. Ghislaine Dupont, « je l’ai entendue dire : "Si vous voulez de l’argent, je vous le donne... Mais laissez-nous." » Selon lui, « il y avait quatre [hommes, ndlr]. Deux derrière, deux dans la cabine. » Il évoque un cinquième, « peut-être ». Le chauffeur, qui travaillait avec Ghislaine Dupont et Claude Verlon depuis plusieurs jours à Kidal, assure qu’il « n’a rien vu venir ». « Ils ne m’ont jamais parlé du côté sécuritaire. Ils ne semblaient pas inquiets. Ils allaient là où ils veulent, quand ils veulent, comme ils veulent. » Il reconnaît cependant que, dans la ville de Kidal, « tout le monde » savait qui ils étaient. RFI
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